Actualité
HIDDEN IN ETERNITY – A Tout Jamais
Hidden In Eternity
A tout jamais
Label indépendant
2018
Dimanche, un jour de pluie.
Ça me fait chier. J’aime pas faire ça.
Tu sais… De la sémantique…
Ca me fait chier, je suis pas un universitaire, le solfège des mots j’y comprends rien.
Mais là va bien falloir :
Déjà pas de lyrisme ici ! Pas d’envolées somptueuses vers les terres sanglantes du tragique de notre condition de déchets d’étoiles. L’album chroniqué a beau être du doom faut pas déconner (trop) non plus. Pas de littérature, pas de calligraphie, pas d’art, pas de spleen. Qu’un billet étrange que je vais servir tiède.
Un peu de sémantique
Tu vois la tristesse, c’est vraiment bidon.
Merci.
Mais ça c’est en écoutant cet album que je m’en suis vraiment rendu compte.
Non non ! Rien à voir avec la qualité de l’oeuvre, ou plutôt si, j’ai aimé prendre le temps de l’écouter. C’est là que j’ai réalisé que la tristesse, putain c’est de la merde.
On parle de quoi quand on parle de tristesse ? D’une émotion ? Provoquée par quoi ? Un évènement extérieur, qu’on va intégrer et faire devenir un sentiment (en gros une prolongation de l’émotion, dans la durée, un ressenti installé, constitutif de nos pensées alors)
Putain c’est nul…
Et le désespoir alors ?
Bon au moins c’est moins merdique !
Le désespoir c’est toi. Tu sais t’es un(e) conna(sse)rd égoïste, un(e) pervers(e), un(e) pas grand chose. Et donc chez toi y a de la connardise, de l’égoïsme, de la perversion, et t’as aussi du désespoir. C’est quand tu t’écroules, mais c’est déjà en toi. Le monde te fait appuyer sur le bouton « siège éjectable » parce que t’es atteint par… On s’en fout ! Mais le bouton il existe déjà ! T’es programmé pour t’écrouler. Et y a plein de manières de s’écrouler, tu peux même t’écrouler pendant des années, une vie.
Et la mélancolie ?
La mélancolie c’est la putain de la vérité qui s’insinue dans ton appareil à problème. C’est un truc qui rend ton cerveau bleu, froid, anémique, proche du grand vide de l’espace, apte à voir la matière noire dominant nos univers, l’écrasant. C’est ça la mélancolie.
Et c’est pas la souffrance ! La souffrance c’est une folie, une restructuration du cerveau. Du coup tu perçois que les illusions sont des illusions, mais tu perçois pas leur au delà… C’est une oeuvre inachevée qu’elle qu’en soit l’intensité.
A tout Jamais
Maintenant que les bases sont là, voyons un peu cet album. Où qu’on en est !
Le son est clair, limpide, tout s’entend parfaitement bien.
Mélodies inspirées…
Inspirées ?
Oui, on sent une forme de sincérité, une mise en place délicate par laquelle le groupe nous invite dans ses mélodies, à s’ poser, à s’en nourrir, puis repartir plus haut encore. Ainsi on a le temps de profiter, de s’imprégner.
Cette sensation je l’ai eue surtout avec la deuxième piste : y a un riff tout con, mais à l’efficacité émotionnelle indiscutable, ça tient tant par la mélodie que par la solennité de la mise en place. On profite ainsi d’un riff qui porte mais de façon différente la mélodie. Celle ci tantôt mise en avant, tantôt par une rythmique de plomb, puis évoluant soutenue par une discrète ligne de fond.
J’ai pas la recette du bon album, encore moins de Doom… Alors t’ouvrir les portes du Royaume Mélancolie… C’est pas avec mon style que tu trouveras le secret.
J’aime l’épure. Or vu l’ambition du groupe, on aurait pu craindre des arrangements ampoulés. Je suis heureux que le groupe ait gardé la simplicité des riffs et une batterie équilibrée comme les principales énergies de l’envol vers les portes du Royaume des Vérités.
Violons, (Vielles ?) apparaissent, disparaissent, mais le couple basse-batterie-guitare perdurent et ce sont eux qui nous portent, et de temps en temps se font ponctuellement aider par d’autres (cités plus haut, ou des chœurs, une nappe de fond). Jamais cette exode stellaire n’est alourdie par le côté pompeux de la production et des arrangements. Voyagez bien, voyagez léger. Cet épure de son, d’arrangements, permet de garder un aspect intimiste aux compositions. Et c’est finalement la grande force de tout cela !
Arrivé à destination ?
Avec A tout jamais HIDDEN IN ETERNITY nous fait un promesse : celle de transcender les choix qui ont été faits.
On ne peut que saluer le professionnalisme et la passion de ces pilotes pour les voyages vers ces terres impalpables où viennent s’immortaliser nos drames de merdes d’étoiles, d’espèce damnée par sa capacité à souffrir : à voir le voile sans pouvoir le déchirer.
Ce voyage n’est pas sans accroc et on notera quelques défauts : des choeurs en trop sur la piste deux, une voix profonde mais trop commune.
Autant maitrisé qu’imparfait, ce voyage fut assez intéressant pour que moi, auditeur, je veuille bien poursuivre le voyage avec ce groupe.
L’album d’une promesse.
Terres promises, terres de sang, mondes des vides grimaçants, de lumières implorantes ; ils sont en route, et nous sommes avec eux.
Robin